jeudi 24 avril 2014

Répression de la Marche du 20 avril 2014 à (...) - Kabyles.Net

Marche du 20 avril 2014 à Tizi-Ouzou

Répression de la Marche du 20 avril 2014 à Tizi-Ouzou

lundi 21 avril 2014par Allas Di Tlelli 34  commentaires
La marche du 15 avril n’a pas été empêchée pour la simple raison qu’elle arrangeait la mise-en-scène de la mascarade du 17 avril et pour cause, les communiquants du pouvoir n’ont pas hésité à présenter, sur les plateaux de chaînes de télévisions occidentales, cette marche comme la preuve de son ouverture démocratique comme ce fut d’ailleurs le cas de « Sant’Egidio bis » de la salle Harcha. En même temps, le RCD a appelé à marcher uniquement en Kabylie pour s’opposer au 4ème mandat, ce qui est en soi et au minimum une débilité politique mais tant que cela arrangeait les affaires du même régime qui a démontré par là, que la contestation de Bouteflika est circonscrite en Kabylie, anyway.
Or, la marche du 20 avril est foncièrement différente et n’arrangeait en aucune façon le système en place puisqu’il est question de rupture totale et brutale avec le pouvoir en place dans sa globalité et de l’affirmation d’une Kabylie majeure qui n’aura plus besoin de tuteur arabo-islamiste.
Ainsi donc,quatre jours seulement après avoir toléré la marche du 15 avril dernier, le pouvoir algérien empêche violemment la marche traditionnelle du 20 avril d’avoir lieu…
Le film des événements :
La marche à laquelle ont appelé le MAK et les signataires de l’appel de Tighremt (Vgayet) du 11-04-2014, a drainé une foule impressionnante qui s’est formée dès les premières heures de la matinée devant l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou. La célébration traditionnelle des printemps 1980 et noir (2001) qui coïncide chaque année le 20 avril, s’est voulue pacifique comme toutes celles qui l’ont précédée et pour cause ; on a remarqué la présence des familles, des enfants et même quelques handicapés moteurs. Les milliers de personnes scandant des slogans anti-pouvoir et pour l’indépendance de la Kabylie, pensaient battre les artères principales de la ville pour marquer l’événement et réaffirmer leur attachement aux symboles que représentent les deux printemps ainsi que leur fidélité au combat des victimes de la lutte de la Kabylie. Le drapeau amazigh est le seul emblème présent en force à côté des portraits de Matoub Lounès et des pancartes et autres tee-shirts frappés du logo du MAK.
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10 h : La montée de l’université est bourrée de monde. Il y a très longtemps que Tizi-Ouzou n’a pas connu pareille effervescence populaire. La marche annonçait une journée commémorative à la hauteur de l’événement, mais c’était compter sans le machiavélisme du pouvoir algérien qui, dès les premières heures de la matinée, a assiégé la ville par des barrages de CRS, coupant plusieurs fois l’itinéraire prévu pour la marche.
La présence de Zedek Mouloud, venu, comme d’habitude, participer à cette manifestation du 20 avril n’est pas passée inaperçue puisque une nuée de fans s’est ruée sur lui pour le remercier d’être là et pour se faire photographier avec lui, histoire d’immortaliser l’événement. Tenna est l’autre artiste qui a tenu à marquer de sa présence cette marche traditionnelle de la Kabylie à laquelle se sont joints des étudiants et même un représentant du peuple Mozabite.
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11 h : Des dizaines d’éléments de la machine anti-émeute se dressent devant le peloton de tête conduit par le président du MAK tandis que les représentants de l’appel de Tighremt, entourés d’une centaine de personnes, sont positionnés loin derrière, à proximité d’une dizaine de membres du RCD regroupés sur le trottoir, au bas du portail de l’université. Barricadant le passage, les policiers armés comme il se doit pour affronter une émeute des grands jours que personne n’avait prévu, semblent décidés à empêcher, pour la première fois, la marche du 20 avril. La provocation était trop grave pour être tolérée par les marcheurs et c’est déjà les insultes qui fusent de part et d’autres. Les marcheurs tentent de parlementer avec les officiers, en leur expliquant que la marche était pacifique, il n’y avait donc pas lieu de l’empêcher sauf s’ils ont reçu des ordres pour transformer une action pacifique en un bain de sang. Les officiers, dans un arabe imperceptible, répondent par la même ritournelle : « la marche n’est pas autorisée et elle n’aura pas lieu ».
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11 h 30 un premier carré a réussi à passer entre les mailles de ce premier blocage pour être arrêté net au niveau du stade du 1er novembre où un autre barrage impressionnant de CRS était placé, produisant ainsi et déjà, deux foyers de tension qui montaient en puissance. Celui-ci éclate après que les policiers aient chargé les premiers marcheurs et c’est la confusion partout. Des projectiles hétéroclites sont échangés entre les 02 camps.
La foule retenue au niveau du campus Hasnaoua bouillonnait devant des éléments antiémeutes qui font des gestes obscènes à des jeunes qui sont, quasi face-à-face avec eux et scandant des slogans anti-pouvoir (« pouvoir assassin », « achetez des couches à Bouteflika », « nous ne sommes pas des Arabes », « Bouteflika-Ouyehia, pouvoir terroriste »…) pour tenter de se frayer un passage afin de tenir leur marche. Soudain, une pierre est lancée dans la direction des marcheurs par un jeune qui était avec les policiers et c’est la provocation de trop qui a mis le feu aux poudres. Des centaines de manifestants, notamment des étudiantes, des femmes et des enfants ont trouvé refuge dans l’enceinte du campus, tandis que des pierres de toute dimension traversaient le ciel dans les deux directions. Les échauffourées ont éclatées à différents endroits de l’itinéraire prévu pour la marche, mais le foyer principal s’est installé devant le campus de l’université, point de départ de la marche avortée.
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Les provocations se multiplient de la part des policiers : gestes obscènes, insultes, jets de pierres… Avec quelques marcheurs, on a tenté d’approcher une autre fois les officiers en leur disant qu’ils n’auraient pas dû empêcher une marche pacifique et surtout celle du 20 avril mais en même temps, il suffisait qu’ils disparaissent du champ de vision des marcheurs pour que le calme revienne et la marche puisse avoir lieu dans le calme. Un officier kabyle nous lance : « nous ne sommes que des instruments ».
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Il est 13 h, le soleil mâchonne les esprits, les projectiles se sont diversifiés et les premiers blessés tombent. On évoque déjà des arrestations et plus d’une dizaine de blessés dont un cas grave, tous admis au niveau des urgences du CHU de Tizi-Ouzou. L’arène des hostilités s’est déplacée plus bas, au niveau du carrefour du 20 avril et les bombes lacrymogènes font leur apparition. Les signataires de l’appel de Tighremt ainsi que la dizaine d’éléments du RCD ont abandonné les lieux, juste après les premières assauts tandis que Bouaziz Ait-Chebib et d’autres adultes tentaient vainement de canaliser la furie d’une jeunesse décidée d’en découdre avec les forces répressives qui ont commis l’affront d’interdire une marche, un 20 avril et, s’il vous plait, à Tizi-Ouzou !
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14 h : Les hostilités ont atteint leur paroxysme et les camions antiémeutes, dépêchés en renfort devant la détermination des manifestants, n’ont fait qu’exacerber l’excitation et la colère de ces derniers. Repoussés sur le boulevard Amyoud menant vers Ihesnawen et l’université de Bastos, les manifestants se dispersent en groupent compacts à travers les rues adjacentes, essaimant les quartiers de la nouvelle ville et empêchant les éléments de la police de progresser car ne sachant plus quel groupe devraient-ils charger. Cernés de part et d’autre, les policiers se sont cantonnés au niveau du rez-de-chaussée de la Tour de la nouvelle ville et du pont qui surplombe le carrefour où ils subissent la pluie de cailloux et de bouteilles de verre qui leur tombent du ciel.
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C’est pendant ce moment crucial des affrontements que le jeune Gacem Rafik, touché à la tête, est transporté par ses amis au niveau de la clinique privée El Djouher où il est admis à 14 h 37 mn. Une heure plus tard, c’est autour du jeune Lounis Barki, touché gravement à l’œil droit par une cartouche à blanc tirée à bout portant selon ses amis qui l’ont transporté à la même clinique avant d’être évacué vers le CHU. A 16 h, ce sont trois autres blessés qui y sont admis.
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Dans un climat de guérilla urbaine, il est quasi impossible de se déplacer d’un endroit à l’autre et donc, de pouvoir recenser le nombre de blessés, estimé à une trentaine, dont deux policiers, qui se trouvent aussi bien au CHU qu’au niveau des cliniques privées de la ville de Tizi-Ouzou.
Scènes insupportables :
Fin de la journée, 17 h 30 environs : on parle de 60 cas d’arrestations qui seraient libérés et c’est à ce moment précis que les échauffourées ont cessé avec l’odeur des gaz lacrymogènes qui empeste encore l’axe jonché de barricades de fortune et de cailloux, allant de l’hôpital jusqu’au bout du boulevard Amyoud. La tension est encore perceptible et c’est le round d’observation entre des policiers qui restent postés dans différents endroits et des groupes de jeunes épuisés qui rassemblent des galets, caillasses et autres objets durs pour parer à toute éventualité.
Tard dans la soirée, les émeutes continuent au niveau du boulevard Krim Belkacem. La manipulation tendant à monter les habitants de la ville de Tizi-Ouzou contre les mouvements kabyles et les provocations des "CRS" se poursuivent en nocturne, l’exaspération et la colère des résidents de ces quartiers se font sentir...
Cette répression et ses travers, marquent-ils la fin de nos "illusions algériennes" ? Le temps nous le dira.
Allas DI TLELLI

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